Wiki Nos imaginations

Cette histoire a été écrite par Lyra Bleue


Équivalent de la quatrième de couverture :

Deux garçons semblent s'intéresser à Lyra, or, elle ne sait pas lequel elle aime. Mais un mystérieux château fait son apparition, et va bientôt être le principal repère de notre jeune héroïne. Laissant ses études de côté, elle vit une vie parallèle dans le palais royal qui est abandonné depuis environ 10 ans. Elle y rencontre un prince qui y est mort avant se fermeture. Elle se retrouve ainsi à entretenir le château et ses salles mystérieuses avec l'aide d'un fantôme qui lui rappelle étrangement quelqu'un.

Samedi 24 octobre 2020 :

"Toutes ces questions qui surviennent du jour au lendemain! Et aucune réponse! Est-ce seulement vrai? Et tout ça à cause d'une pauvre réalité! Je...je ne sais plus où j'en suis. A qui dois-je faire confiance? Mon cœur est partagé. Et cette salle mystérieuse qui m'intrigue! Elle est tellement majestueuse! Pourtant, personne ne semble la connaître. Personne ne l'a jamais vue. Ce palais qui n'est plus habité ni visité, condamné à l'abandon, ce lieu où les araignées se donnent rendez-vous, contient plus de pièces cachées que tout autre gigantesque château. Ma solution à ce sentiment est-elle là?"

Dimanche 25 octobre 2020 :

"J'y suis retournée! C'était magnifique! Toutes ces couleurs sous la poussière! Je me suis imaginée à un bal où toutes les jeunes femmes de ce qui était avant un royaume étaient présentes. Le prince Maxence était là. Je dansais dans une robe somptueuse de mousseline blanche. Tous les hommes m'admiraient et les femmes m'enviaient : je dansais désormais avec le prince. Il me faisait tournoyer à travers la grande salle. Et à la fin de cette scène inoubliable, il m'a demandé ma main! Maintenant c'est mon imagination qui s'y mêle! Et me voilà amoureuse d'un prince qui n'existe même plus et que je n'ai jamais vu. Mais j'ai une idée presque parfaite de à quoi il ressemble, de son caractère, de son pas de danse si agréable… Oui! Je l'aime! Peut-être est-ce seulement ma conscience qui me dit qu'aucun des deux garçons que je connais n'est pour moi. J'ai tout de même remarqué une petite ressemblance avec ce "fantôme" et un de ceux que je croyais aimer."

Lundi 26 octobre 2020 :

Je suis retournée voir s'il y avait encore accès à la salle mystérieuse. J'y suis entrée et elle n'avait pas changé depuis la veille. Je tournoyais dans la pièce tout en rêvant à cet instant magique vécu hier, quand je trébuchai sur la première marche d'un petit escalier qui menait à un grand fauteuil au fond de la pièce. Je me relevais avec peine quand j'entendis un bruit. Je me précipitai contre la mur à droite de l'escalier et palpais le bois qui y était à la place de la pierre qui formait les autres murs. Je sentis une serrure puis une poignée sous mes doigts. C'était une porte. Un autre bruit, cette fois plus proche. Sans réfléchir, je l'ouvris et passai de l'autre côté : le spectacle qui s'offrait à moi était...il n'y a pas d'adjectif qui convienne. Une salle plus petite que la première était remplie de bibliothèques, de fauteuils et de sofas, ainsi que de petites tables minutieusement décorées. De la vaisselle en argent et en porcelaine était posée sur les tables malgré l'importante couche de poussière qui la recouvrait. Elle ne devait avoir été utilisée depuis des dizaines d'années! Encore une salle mystérieuse dans cet immense château."

Lundi 2 novembre 2020 :

"Cela fait une semaine que je ne suis pas allée au palais. Aujourd'hui, c'est décidé, j'y retourne.

Les salles n'avaient pas changé. Mais sur le guéridon à gauche de la porte de la deuxième pièce, il y avait un vieux livre. Le titre était écrit en lettres d'or : Une amitié finie. Je l'ai pris dans mes mains et je l'ai dépoussiéré. Je l'ai emporté avec moi pour le lire. Un passage m'a particulièrement marqué : il raconte toute une scène qui détruit l'amitié entre deux jeunes filles.

"-Je voudrais avoir un animal.

-Choisis bien lequel, lequel tu veux. Ils sont tous infidèles, et ne combleront aucun vœux  :

1) Le cochon d'Inde est si sensible qu'à la moindre alerte, il fuit vers la lumière en haut des montagnes, là où quelqu'un l'attend, quelqu'un qui ouvre les portes du paradis ou celles de l'enfer.

2) Les chevaux galopent et fuient à ton approche. Ils fuient tes rêves les plus fous, tes rêves de monter dans les plaines sur leur dos, de les brosser, de les nourrir. Ils fuient et ont peur de tes parents. Ils emportent avec eux tes rêves de bonheur.

3) Les chats ont besoin d'affection, tant d'affection que si pendant une seule minute tu n'es pas auprès d'eux, ils partent par tristesse et solitude. Ainsi, te voilà seule, sans animal, car ceux que tu as eu sont partis, tous ceux que tu as voulu avoir t'ont fuie.

Et de même, tous tes amis s'en iront, te fuiront. Puis, ce sera à ta famille de partir à ton approche. Ainsi, toutes tes plus fidèles amies partiront en t'oubliant, ou te laisseront de côté. Elles partiront loin et déménageront, elles se disputeront et ne te parleront plus. Et si seulement une continue de bien s'entendre avec toi, alors tu auras bien de la chance car cela n'est encore jamais arrivé.

-Mais alors, pourrais-je avoir un animal sauvage?

-Ils sont tout aussi infidèles que les autres :

1) Le chevreuil et le sanglier ne peuvent pas vivre chez quelqu'un et on les chasse.

2) Le lapin est encore acceptable mais seulement un sur trois survit. Choisis le bon. Et quand ils sont vieux, ils sont sages et donnent des conseils. Mais tu ne pourras pas les entendre : tu n'es pas un lapin.

3) Un hérisson ne dure pas et certains animaux ne peuvent pas être domestiqués ou sont interdits or de la nature.

-N'y a-t-il donc aucune solution?

-Non. Aucune. De toute manière, même si tu en veux et que tu n'en as pas, ta vie est réduite à néant. Si tu en veux vraiment, achète-toi une peluche, il n'y a rien de mieux.

-C'est parce que tous tes rêves sont brisés que tu me dis cela! Mais moi, j'irai jusqu'au bout de mes rêves, de mes rêves les plus fous, je partagerai mon bonheur avec les autres : amis et famille. Et personne, pas même moi, ne sera déçu."

C'est quelque chose de si bête, mais je ne m'y attarde pas plus : je n'ai pas envie de me poser des questions supplémentaires."

Jeudi 5 novembre 2020 :

"Aujourd'hui, je suis allée reposer le livre sur le guéridon de la petite salle après les cours, et j'y ai trouvé un petit mot écrit avec une écriture agacée, furtive :

"Lyra, ne vous fixez pas un objectif trop imposant et dur pour vous. Ce château recèle mille et un trésors! Vous avez découvert deux des nombreuses pièces inconnues, cachées. Vous êtes celle qui fera revivre ce palais. Nettoyez les salles, rangez les choses qui traînent, mettez de l'ordre, rendez les lieux accueillants. Vous êtes la seule personne encore capable de remplir cette tâche. Je ne suis plus qu'un fantôme. C'est à peine si j'ai pu écrire ces quelques mots : le stylo me glisse entre les doigts!

Mes plus respectueuses salutations et mes remerciements,

Prince Maxence"

Ce mot m'a entièrement retournée, mais, aussi fou que cela puisse paraître, pour ne pas me poser de questions, j'ai commencé le travail qu'il m'avait confié. Que sa Majesté m'avait confiée!"

Vendredi 6 novembre 2020 :

"C'est tellement étrange de faire quelque chose ordonné par un fantôme et de le prendre vraiment au sérieux. Depuis hier, je n'ai fait que de faire le ménage, ranger, réorganiser le château. Pourtant, j'avais tant de travail à faire! Mais cela me procure plus de plaisir que le fait de travailler. Je peux visiter les lieux en ayant une sorte d'autorisation. J'ai l'impression que cela atténue l’ampleur de tous les problèmes survenus ces derniers temps. Ma famille, mes amis, et mon travail passent à côté, en second... En dernier tout compte fait."

Samedi 7 novembre 2020 :

"C'est incroyable tout ce qu'on est capable de faire en deux jours! J'ai dépoussiéré le "petit salon", comme je l'ai appelé. J'ai tout remis en place après avoir tout déplacé. J'ai aussi passé un bon coup de balais dans la "salle de bal". Mais je devrai apporter une échelle demain pour nettoyer tout ce qui est en hauteur. Je n'ai suivi aucun cour! Mais, de toute manière, ils ne m'intéressent pas. En tout cas, pas assez pour m'empêcher de retourner au château."

Lundi 9 novembre 2020 :

Maman ne m'a pas laissée y aller hier sous prétexte que "pour une fois que mes frères et sœurs sont là(vous connaissez la suite)". Mais j'ai mieux pu me rendre compte de tous les changements que j'ai apportés. J'ai aussi eu une invitation du prince à continuer de visiter les salles pour m'en occuper. Il me dit où sont tous les outils de ménage et autres! Je me demande si c'est vraiment un fantôme : je n'y crois pas trop. A mon avais, c'est quelqu'un qui m'a surprise un jour, et qui a voulu me faire peur, ou me mener en bourrique. Mais cela me plait plus qu'autre chose! Et puis...je profite de la moindre petite occasion.

Mardi 10 novembre 2020 :

Je n'arrive pas trop à savoir si c'est vrai ou non, mais...je crois l'avoir vu! Il m'observait, caché derrière un mur quand, me retournant, je le vis. Je me demandais qui c'était, du coup, j'ai couru après lui...mais il a disparut dans un couloir! J'ai cherché partout sans le retrouver! Alors, suite à cette aventure, je me suis dit que c'était lui : le prince Maxence Harty. C'est incroyable!!! Est-il vraiment mort? Où alors, les fantômes existent vraiment! Il faudrait que je remette en cause tout ce que j'ai appris durant mon enfance, tout ce que l'on m'a fait ingurgité... Oh bah mince alors! C'est quand même trop bizarre! Bon, à demain cher journal. Je sens que je vais passer une très mauvaise nuit!

Samedi 14 novembre 2020 :

Je ne pensais pas que cela ait pu m'arriver un jour! Mercredi dernier, je suis arrivée comme d'habitude par la grande salle de bal. Comme tous les jours, je suis entrée dans le petit salon du fond. Mais cette fois-ci, j'ai voulu pousser ma curiosité au delà de ce que j'avais déjà vu, nettoyé, rangé, fouillé. J'ai pris une porte qui se trouvait derrière un rideau, et...c'était fabuleux! Je ne pensais pas que cette toute petite porte si discrète pût s'ouvrir sur un immense hall avec un magnifique escalier de pierre blanche. Je l'ai monté et, à partir de cet instant, je savais que je pourrais visiter tout le château. Au premier étage, il y a des salons, des bureaux, des salles de billards, des fumoirs, des salles de réunion... Au second, il y a des chambres, des cabinets de toilette, d'autres bureaux, des salles de jeux pour enfants... Et au dernier étage, il y a les chambres du personnel et leurs cabinets de toilette. Mais, lorsque je suis entrée dans la chambre d'un valet (du moins c'est ce que je pense) située tout au fond d'un couloir étroit, j'ai vu une ombre se faufiler derrière une tenture décolorée et à moitié rongée par les mites. Je ne sais pas encore pourquoi, mais j'ai fermé la porte coup sec. Pourtant, cela me rendait prisonnière de cette salle avec une ombre inconnue. Peut-être voulais-je simplement ne pas la laisser s'échapper. Toujours est-il que, en cherchant cette dernière, je me rendis compte de l'obscurité de la pièce. A travers la lucarne, un ciel sombre et rempli d'étoiles surplombait la ville. Il devait être au moins vingt heures! Mais, obstinée (c'est dans ma nature depuis toute petite), j'ai détourné mon regard de la petite fenêtre pour me concentrer sur le lieu où je me trouvais. Aucun mouvement n'était percevable. J'attendis donc. J'étais bien déterminée à savoir qui était réellement cette ombre qui semblait me suivre depuis mon arrivée dans le petit salon du fond de la salle de bal. J'ai dû attendre au moins deux heures avant que le grincement d'une latte de parquet me fasse sursauter. Levant les yeux, je vis l'ombre se dresser devant moi, immense, gigantesque. Je voulu reculer, mais je me rendis compte que me trouvais en fait assise contre la porte et que je m'étais assoupie. Profitant de mon sommeil, l'ombre avait dû essayer de se frayer un passage à travers les meubles renversés sans me réveiller. Raté! Je décidai donc de me mettre debout pour pouvoir voir à qui j'avais à faire. Elle ne bougeait toujours pas. Et moi, je m'étais maintenant mise sur mes deux pieds et regarder en face le mystérieux personnage, toujours collée à la porte. Son visage était baigné de l'obscurité régnante. Mes ses yeux d'un bleu profond me fixaient. Soudain, il me pris par les épaules, me décala contre le mur, et ouvrit la porte pour courir dans le couloir et s'enfuir loin de moi. Loin de moi ou de ma trop grande curiosité? Mmmmh... Va savoir... Enfin, crevée par les derniers événements et découragée par la perspective d'une bonne "engueulade" de retour à la maison, je choisis donc de trouver une chambre en assez bon état pour me coucher et dormir. Ce ne fut pas facile, je vous l'accorde, en sachant que quelqu'un d'autre passait sûrement sa nuit dans le même bâtiment que moi. Le matin, après avoir utilisé le matériel de toilette d'une bonne, je suis allée voir les dernières pièces non visitées. Descendant jusque dans les sous-sols, je découvris les cuisines et curieusement, un bol de lait fumant et une tranche de pain tartinée avec du beurre étaient posés sur une table de préparation. Était-ce de la part de l'ombre? Sûrement! Enfin, cela voulait aussi dire qu'elle n'était pas loin. Poussée au bout de ma curiosité, je ne pus résister à la tentation de fermer la porte par laquelle je venais d'entrer et de me diriger vers une petite porte au fond de l'immense pièce. L'ouvrant avec prudence, j'entrai dans une petite salle, peu meublée, mais éclairée par la lumière du jour naissant. Les murs de pierre froide n'était aucunement décorés et seules quelques chaises, une table, et une étagère témoignaient de l'usage fait de cette pièce. Le bruit d'une porte claquée me fit sursauter. Je me retournai, affolée. Et c'est là que je le vis, devant moi, enfin. Cher journal, le jeudi 10 novembre restera marqué dans ma mémoire à jamais. A 17 ans, j'ai enfin découvert la réalité. Encore un mensonge fait à l'humanité toute entière! Et oui, devant moi se tenait un jeune homme d'à peu près mon âge, brun, les yeux bleu nuit parsemés d'étoiles, à peine une demi-tête de plus que moi, la peau légèrement bronzée, en bref, ma-gni-fi-que! Mais son regard fixé sur moi, je m’aperçus d'un léger problème : l'homme qui me faisait face était belle et bien le prince Maxence Harty, disparu il y a dix ans de cela, déclaré mort. M'apercevant que je retenais ma respiration, je baissais le regard vers le sol pour reprendre mes esprits et, surtout, par marque de respect envers l'homme qui était censé gouverner. Il s'est un peu écarté de moi (il était très proche et m'empêchait donc de faire ne serait-ce qu'un mouvement) et a pris la parole en gardant son air sérieux. Sa voix était profonde mais pas grave. Comme sa personne en elle-même, elle était tout simplement mystérieuse.

-Lyra, c'est bien cela?

Je hochait la tête.

-C'est vous qui lavez les pièces, qui les rangez?

Je hochait la tête.

-C'est vous qui avez visité entièrement le palais en allant jusque dans les chambres des domestiques?

Je hochait la tête.

-C'est vous qui venez donc tous les jours ici?

Je hochait la tête.

-C'est vous qui avez dormi ici?

Je hochait la tête.

-Excusez cette question, mais pourquoi ne parlez-vous pas et ne me regardez-vous pas quand je vous parle?

Je hochait la tête. Je me rendis compte trop tard de mon erreur. Je m'était couverte de ridicule, j'avais montré ma timidité, révélé ma personnalité, et le prince riait aux éclats. Je pense que je n'ai jamais eu aussi honte de ma vie et que mes joues ont dû sérieusement rougir. Ce dialogue aussi je vais m'en souvenir : le premier échange avec l'habitant du château. Pour accélérer, les événement qui vont suivre ne sont pas assez important pour que je les raconte tous, donc je vais passer à l'essentiel. Sa Majesté m'a fait visiter en détail le château et m'a expliqué à quoi il voulait que ressemble chaque pièce après ménage et rangement. Si je n'écris que maintenant, c'est parce que j'ai dû rattraper mes cours, être punie par ma mère, être punie par mon père, être punie par la direction de deux jours sans cours, et j'en passe. Bien sûr, je te rassure cher journal, je n'ai parlé de tout cela à personne à par toi. La question qui passe par-dessus les autres actuellement, c'est que le prince m'a donc menti en m'écrivant qu'il n'était plus qu'un fantôme...sauf si, en fait, il en est vraiment un mais que je ne m'en suis pas encore rendue compte physiquement.

Dimanche 15 novembre 2020

Je vais devoir mettre bouchée double sur les arguments que je donne à ma mère pour sortir de la maison quand ce n'est pas pour aller en cours. Ma maison est une vraie prison et ma mère en est la gardienne! Pff... Je dois ab-so-lu-ment y retourner! C'est primordial! Il faut me comprendre quoi! Je dois trouver des réponses à toutes mes questions...et puis, cet endroit me sert aussi d'échappatoire. J'ai tellement de problèmes à côté de cette vie que j'étale avec mon encre sur ce papier. J'avais deux bonnes amies. La première a déménagé l'année dernière en Russie...tu t'imagines le changement pour elle...et pour moi. La seconde m'a lâchement abandonnée à l'arrivée au lycée pour traîner avec le plus beau garçon de la classe et sa bande. En plus de ça, elle me parle toujours comme une vraie amie mais pour dire des choses qui lui feraient plaisir mais qui me concerne (exemple : "Tu vois bidule là-bas? Ben je te vois trop avec lui. Vous feriez un beau couple!") Combien de fois vais-je lui dire que ces choses ne m'intéressent pas, mais alors pas du tout! Fin bref, tout est soûlant! D'habitude, j'essaie de faire attention à mon langage, mais là ça commence à bien faire! Voilà pourquoi mes balades au château sont presque vitales.

Lundi 16 novembre 2020

Maman et Papa partent en voyage demain. Quelle chance! Non pas que je sois contente de leur absence mais un peu quand même. Je vais enfin pouvoir faire un tour au château. Je me demande ce qui m'attend là-bas. Ce qui est sûr, c'est que je vais tout de même devoir attendre une semaine avant que ma mère parte et que je retourne au palais.

Dimanche 22 novembre 2020

Mes parents sont partis hier soir, mais je n'ai pas eu le temps d'aller au château après. Or, ce matin, je me suis réveillée très tôt. Je n'arrivais pas à me rendormir, alors je me suis préparée pour partir au palais. Quand je suis arrivée, la première chose que j'ai faite, c'est d'appeler l'habitant à grand renfort de cris. Je ne le trouvais pas. je suis donc montée dans les combles et je suis descendue dans les caves. Je me suis finalement décidée à aller sur le toit, mais il ne s'y trouvait pas non-plus. Alors, j'ai ouvert la porte qui menait aux jardins. Le jardin? Il n'était plus entretenu et il était rempli de broussaille, de mauvaises herbes… C'est à peine si on distinguait les allées de graviers. J'y ai passé la matinée. Vers midi, la faim me rappela à l'ordre : j'étais tout d'abord venue pour faire le ménage, pas pour voir le prince. Seulement, je me rendis vite compte que les jardins étaient un vrai dédale de buissons, d'arbres, de fleurs et de mauvaises herbes, que je ne savais plus où j'étais. Impossible de me repérer dans ce labyrinthe naturel. Aussi, quand j'aperçu le toit octogonal d'un kiosque à musique. Droit devant moi, au bout de l'allée, me tendant les bras. Je me dis que je n'avais rien à y perdre et que je pourrais peut-être voir quel chemin prendre pour rejoindre le bâtiment principal. Je ne fus pas déçue. Oh, de là-bas, je ne voyais rien qu'une étendue de buissons, d'arbres et de mauvaises herbes, mais j'avais aussi un GPS vivant et parfait pour me conduire à bon port. Je gravis les marches lentement pour ne pas sortir de ses réflexions le prince Maxence. Assis sur un rebord du kiosque, dos à moi, il contemplait une petite marre encore à peu près propre et les quelques arbres en fleur qui le bordaient. Il n'avait plus l'air rieur de la dernière fois, son sourire qui semblait ne jamais pouvoir disparaître n'était plus présent. Il semblait triste, courbé, les coudes sur les genoux, les mains croisées, le regard perdu dans sa contemplation. Tong-tong! J'avais marché sur une dalle bancale et le prince, surpris par le bruit, s'était retourné d'un coup, se remettant debout à l'intérieur du kiosque.

Kiosque à musique

-Oh! C'est vous.

-Oui. C'est moi.

-Comment êtes-vous arrivée ici?

-Je me suis perdue… J'ai deux faveur à vous demander. D'abord...par pitié, tutoyez-moi!

Il éclata de rire. Son sourire était revenu. Il s'était comme métamorphosé.

-Ensuite, pouvez-vous me reconduire à l'intérieur?

-Si je te tutoie, tutoie-moi. Même si je suis un prince. Je n'en ai plus que le titre. Et, oui, bien sûr, je vais te reconduire. Et en plus, je vais te donner un plan pour ne plus te perdre.

J'ai senti le rouge me monter aux joues… Il m'a raccompagnée, et je n'ai pas pu m'empêcher de lui poser des questions, curieuse comme je suis.

-A quoi pensiez-vous...heu...pensais-tu?

Il pouffa.

-Au passé…

-Quand tu avais encore tes parents?

-Oui.

-Tu penses à eux avec tristesse, mélancolie, ou...autre chose?

-Avec culpabilité. Avec tristesse. Avec mélancolie. Avec...bonheur.

-Pourquoi?

-Pourquoi quoi?

-Pourquoi tu y penses et pourquoi de la culpabilité, de la tristesse, de la mélancolie, du bonheur aussi?

-J'y penses maintenant et depuis le début parce que je n'ai que cela à faire en plus d'étudier. Avec tristesse, parce que j'ai perdu ma famille. Avec mélancolie parce que je n'ai plus rien à faire sans eux et qu'ils me manquent. Avec bonheur parce que je me souviens des moments heureux que j'ai vécus avec eux. Avec culpabilité parce que...je n'aurais pas du jouer avec le feu.

-Quoi?! Ne me dis pas que c'est toi qui a provoqué l'incendie!

-Si.

-Mais comment as-tu fait ton compte?

-J'étais seul dans ma chambre, un soir, et je ne voulais pas dormir parce que je m'étais disputé avec mes parents et mon frère. Donc, dans le noir, j'ai allumé plusieurs bougies sur le rebord de ma fenêtre. Je voulais brûler toutes les lettres que mes parents m'avais faites. Le temps que je les récupère dans un tiroir et des caisses partout dans ma chambre, et j'ai sentis une odeur de brûlé derrière moi. Je me suis retourné...mes rideaux avaient pris feu. Je suis sorti en hurlant et en parcourant tout le château et je suis venu m'abriter dans le kiosque où tu m'as vu tout à l'heure. Que le feu fut éteint, personne ne m'avait trouvé. Tout le monde en a déduit que j'étais mort, comme ma sœur, mes parents, et mon frère. Sauf qu'ils avaient leurs corps et pas le mien. Personne n'a été capable de dire d'où était né l'incendie, pour quelle raison… Mais moi, je savais. Et je sais encore aujourd'hui.

Il baissait la tête en parlant et je devinais les larmes qui coulaient le long de ses joues. Quand nous sommes arrivés au château, le prince, dans ses habits royaux, comme à son habitude, remonta les étages tandis que je faisais les ménage des pièces du bas. Peut-être que le jour où je nettoierai les pièces du haut, il descendra en bas. Nous n'avons plus échangé un mot. Et maintenant, je t'écris, cher journal, pour te raconter cette journée révélatrice. Ce n'est plus le seul à le savoir, que c'est lui qui l'a provoqué, maintenant il y a nous deux.

Vendredi 27 novembre 2020

Qu'est-ce que j'ai été conne! Mais qu'est-ce que j'ai été conne! Oh oui je l'ai été! Et maintenant, je pleure. Pourquoi? Je t'ai oublié cher journal. J'ai pensé quelque chose...et je me suis trompée. Grosse erreur d'avoir espéré cela. Et à cause de cette foutue pensée, à cause de ce foutu espoir, je t'ai oublié. J'ai un retard à rattraper.

C'était Lundi dernier. Lundi 21 novembre 2020. Je suis allée au palais, comme d'habitude. J'ai encore gâché du temps d'étude pour ce plaisir que d'aller dans un lieu mythique. Je me plaisais à nettoyer, ranger, organiser une grande chambre au premier étage. Elle était légèrement noirâtre. Je pensais à ce que la Prince Maxence m'avait dit. Je me comprenais pourquoi il y avait si peu de meubles. Et je l'ai vu entrer. Il ne parlait pas. Il n'a pas parler de la journée. Il s'est agenouillé à côté de moi. Il m'a aidée. Il rangeait. Il nettoyait. Si, je me souviens. Il a dit une phrase. A la fin, quand je lui ai dit merci.

-Il faut bien que je répare mes bêtises.

Je suis partie, désolée de lui avoir fait de la peine. Je venais de comprendre que c'était sa chambre que je rangeais avec tant d'attention. Je me demandais où il avait vécu tout ce temps, qui l'avait recueilli. Qui était aussi au courant.

Je me suis mise à l'aimer un peu. Au début, je trouvais cela incroyable de connaître un prince qui était censé avoir disparu! Mais là, je me disais que c'était peut-être presque un ami.J'avais un peu pitié aussi. Non, je compatissais. Mais, au bout de deux jours, je me suis mise à l'aimer encore plus. Je me souvenais sans cesse des moments où je l'admirais et je me disais que c'était plus par amour que par surprise. Quand je l'ai vu pour la première fois par exemple, je lui trouvais les yeux bleus nuit et remplis d'étoiles. J'y repensais. Le soir, je me relisais. Et il venait de plus en plus m'aider dans mes tâches au service du château, et à son service. Alors, je me suis dit que je l'aimais vraiment, d'un amour profond, comme mes parents s'aiment, et que le prince devait sûrement m'aimer pour agir de plus en plus envers moi. J'ai été bête. Mais bête! Maintenant, c'est cela que je trouve incroyable. Ma stupidité. Mon égoïsme. Lui ce n'est qu'un prince. Et encore, je reprends ses mots, il n'a que le titre. Sa richesse a disparu avec sa bêtise. Son domaine ne lui appartient plus vraiment. Il n'a plus l'autorité qu'il devrait avoir dans notre pays. Mais je m'étale, je m'étale, mais je n'ai toujours pas expliqué ma stupidité. Il venait de plus en plus souvent m'aider, mais hier...il n'est pas venu. Alors, je me suis inquiétée. Je l'ai cherché partout dans le château.Vers 21 heures, j'ai finalement décidé de sortir dans le jardin après avoir fait pour la quatrième fois le tour du château. Pas là. Il avait dû lui arriver quelque chose. J'avais peur pour lui. J'hésitais même à le chercher dans la ville. Mais je me disais qu'il ne devait pas avoir le même nom en ville que dans son château et que la ville était bien trop grande et qu'il était bien trop tard. Alors, je suis rentrée chez moi avec mes inquiétudes et mon amour naissant. Même si j'allais à l'encontre de mes idées, je me disais que cela ne pouvais rien me faire d'aimer quelqu'un. J'ai toujours dit à ma soit-disant amie que cela n'était pas mon projet de vie et que, même pour m'amuser, je ne sortirais jamais avec un garçon parce que c'est du sérieux ce genre de choses. Et là, je me disais tant pis. Adieu mes anciennes pensées. Peut-être que si on aime vraiment quelqu'un on peut se permettre de remettre à jour nos idées, nos pensées.

Et ce matin, je le cherche à nouveau, dans la maison. Je trouve dans sa chambre, comme si de rien n'était. Comme si je ne l'avais pas cherché pendant toute la journée la veille, comme si je n'avait pas passé ma nuit à m'inquiéter pour lui. Mais tout de suite, je me suis dit qu'il ne savait rien de ce que je ressentais à son égard. Je me ravisai et me décidai à lui demander où il avait passé sa journée. Il m'a regardé d'un regard si...inexpressif. Changé. Différent. Ce n'était plus le même prince Maxence. Il m'a simplement dit :

-Tu sais, j'ai aussi une vie à l'extérieur de mon passé. Je n'ai pas forcément le temps de passer mes journées ici. Tu devrais en faire autant d'ailleurs.

Il est sorti. Moi, j'ouvrais grand la bouche et les yeux. Maintenant, j'éprouve du mépris pour cet homme qui ne sait pas aimer ce qui le rattache à son passé. Moi, j'aime ce domaine, j'aime son passé si...mystérieux. J'en abandonne mes études. Et lui, alors que c'est la seule chose qui lui reste de sa famille, il n'est même pas foutu de se faire pardonner en entretenant ce magnifique palais. Alors qu'il culpabilise d'avoir fait une petite bêtise à la suite d'une colère qui s'est transformée en incendie, il ne fait même pas ce qu'il faut pour se racheter, pour réparer sa faute. Alors, c'est décidé. Je ne l'aime plus. Je n'aimerais jamais plus quelqu'un. Même s'il paraît la personne idéale.

Samedi 28 novembre 2020

En fait non, je le déteste. Il a été insupportable. J'ai espéré encore ce matin. Mais non. Il ne veut même plus me parler. Il ne me répond plus, ne m'écoute plus, me fuit. J'en souffre. Je n'aurais pas dû me laisser aller à ce sentiment trop fort et qui ne promet que la tristesse et la souffrance. Et je retourne comme une débile dans ce château...qui n'a été brûlé que par la bêtise d'un gosse! Et ce gosse joue la comédie d'un enfant pourri gâté. C'est pour cela qu'il regrette sa petite enfance : c'était le prince, il était donc gâté, servi. C'est cela qu'il doit regretter! J'ai hâte de retourner en cours. Cela m'empêchera d'y penser...et de me faire gronder pour une cause perdue!

Lundi 30 novembre 2020

Hier, je ne suis pas allée au palais. Cela lui apprendra à jouer les faux amis. Et aujourd'hui, je suis allée en cours. Quand je pense que j'ai comparé le prince à un élève de ma classe...qui m'a évité depuis le début de la journée. Il a paru extrêmement énervé contre la prof. d'espagnol qui a imposé des groupes mixtes pour un exposé et qui nous a mis tous les deux alors qu'au début de l'année, il aurait été plutôt content...lui qui n'est pourtant pas coureur de filles. J'en suis plutôt déçue. On ne peut décidément faire confiance à personne! Alors, ce soir, j'ai décidé d'aller au château, de trouver le prince Maxence et de lui dire en face ce que je pense de lui. Ces quatre vérités. Je ne sais pas ce qu'il me répondra mais je risque de me prendre un bonne gifle! Enfin bon...il n'avait qu'à bien se tenir...

Si ce papier imprimait tout ce qui est en contact avec lui, il n'y aurait pas seulement l'encre avec laquelle j'écris, mes empreintes digitales, mais aussi mes larmes sur les pages gondolées, et les empreintes digitales...du prince... J'ai fait l'erreur de ma vie en allant le voir avec mon journal...en allant le voir tout court en fait. Je vais tout raconter puisque, de toute manière, je n'arriverai pas à dormir.

J'ai décidé, pour me donner du courage, de t'emporter, cher journal. Je suis arrivée devant le château quand j'ai entendu des éclats de voix. Je me suis cachée rapidement derrière une colonne. Il y avait parmi le groupe de jeunes hommes les deux garçons de ma classe qui me font un peu d'effet. Enfin c'est ce que je pensais à ce moment-là. Je regardait, cachée. Et je les voyais rire, se donner des tapes dans le dos. Et puis j'ai entendu le gars-que-j'aime-bien-mais-que-je-ne-compare-pas-avec-le-prince dire au gars-que-j'aime-bien-et-que-je-compare-au-prince :

-A demain! On te laisse là, comme d'hab?

-Ouais. J'attends mon père, a-t-il répondu.

Tout le monde est parti en grands éclats de rire. Je suis restée cachée. Il n'y avait plus de bruit. On entendait le reste du groupe s'en aller en riant. Leurs voix s'éteignaient au fur et à mesure qu'ils s'éloignaient. Mais toujours aucun signe du gars-que-j'aime-bien-et-que-je-compare-au-prince. Sauf que, au bout d'un moment, je le vis se diriger vers la porte du palais. Il y entra. Je devais ouvrir des yeux grands comme...des assiettes. Je me décidais à le suivre. En silence. Je le vis monter le grand escalier le plus naturellement du monde, et je le suivis. Je le vis entrer dans la chambre du prince sans aucune hésitation. Je l'attendais dans le couloir. Et je vis le prince sortir. Il me vit et rougit très très très très (...) fort.

-Lyra? Tu...il est tard.

-Donc, si je comprends bien, tu es à la fois le prince le plus...égoïste, et l'intello de la classe avec qui la prof d'espagnol m'a mise en binôme pour faire un exposé qui le soûle un max! Dis-moi oui ou non, mais dis-moi la vérité. C'est tout ce que je te demande!

-...

-Laisse tomber. Je te déteste!

Et je t'ai balancé à sa figure. Ça, tu dois l'avoir senti. Il t'a rattrapé...et c'est là que j'ai fait une énorme erreur...je t'ai laissé tomber. Je suis partie en courant me perdre dans le jardin sans toi, en te laissant dans le mains de mon désormais pire ennemi. J'ai vraiment été bête. C'était trop tentant pour lui de te lire. Et trop facile. Alors, j'ai dû rester pleurer au moins une demi-heure dans le kiosque de la dernière fois. Je regardais le paysage : arbres, plantes inconnues, marre, poissons, tout était foncé. Prête à l'arrivée en "triomphe" de notre cher prince qui m'avait depuis toujours menti et qui se prenait sûrement pour le roi de la Terre.

-Lyra...

Je ne répondis rien. Je ne le regardais même pas.

-Il faut que tu comprennes... Ma vie est...extrêmement étrange. Je n'en ai jamais rien dit à personne. A part toi. Je dois sans arrêt me cacher, me faire une couverture, essayer d'oublier pendant le jour ma vie passée, et m'en imprégner la nuit. Oublier, cela m'est impossible. Me souvenir, c'est trop douloureux. Je fais comme je peux. J'ai toujours vécu dans l'entre souvenir et oubli. Et je ne pourrai jamais vivre autrement que comme cela... Je souffre de mes bêtises et je regrette infiniment ma sottise.

C'était trop cramé. Il a forcément lu mon journal. Pour dire ça déjà. Mais écoute plutôt la suite.

Il s'est assis à côté de moi et m'a regardé. Enfin, il a plutôt regardé le côté de mon visage car je regardais le sol.

-Tiens.

Il m'a tendu mon journal.

Je l'ai pris sans rien dire.

-Ma vie est faussée de mensonges par centaines. Même quand j'étais petit et que j'avais encore ma famille. La famille royale vit dans le mensonge. Elle vit toujours en mentant dans les mensonges des autres.

-Et bien ce n'est pas bien. S c'est dans tes gènes, il fallait me le dire plus tôt. Maintenant il est trop tard. Je suis trop franche et vraie envers moi-même et les autres pour côtoyer un menteur de naissance.

-J'ai lu ton journal.

-Mais je n'en doute pas Monsieur Sans-gêne!

-Je croyais que je mentais toujours.

-Pas quand c'est déplaisant.

-Ah.

-Ah quoi?

-Eh bien...je constate que tu n'es pas prête à me faire à nouveau confiance.

-Oh que non! Plus jamais je ne te ferai confiance!

-D'accord. Si tu veux. Je m'en fiche.

-Moi aussi.

Et il s'est levé. Il est rentré dans le château me laissant seule avec toi. Mais cette fois-ci, j'avais menti. Je suis triste de ne pas lui avoir dit que je tenais à lui. Il m'a blessée. Il a aussi brisé mes rêves. Alors je me sens incapable de dormir. Pourrai-je seulement dormir un jour? Pas avant que cette histoire soit oubliée. Il a raison pour une chose : ce n'est vraiment pas facile d'oublier!

Mardi 30 novembre 2021:

Un an! Un an que je ne t'ai pas parlé cher journal! Mais je t'ai retrouvé sous mon matelas ce matin et j'ai beaucoup de choses à te raconter. En un an...il s'en passe des choses! Je suis si heureuse et si malheureuse de mon année! Enfin...aujourd'hui, j'ai 18 ans, un mois et quelques jours. Alors, libre à moi de penser comme je veux et d'agir comme je veux. Alors plus personne ne me bloquera, ne m'empêchera, ne m'emprisonnera! Non! Je serai libre, autonome! Et je vais prendre cette liberté et cette autonomie le plus tôt possible! Demain? Après-demain? Le plus tôt possible, c'est tout.

Un an sans rien faire et en faisant des tas de choses. Un an de grands et de petits bonheurs. Un an de grands et de petits malheurs. Un an en alternance dans un château et dans une maison. Un château...si vaste et si vide! Une maison...si petite et si remplie de choses inutiles!

Un an à penser et à agir. Un an à travailler et à réfléchir. Un an si...difficile...si incomplet...si triste...si...vaste et si vide.

Comme le Palais royal, cet an fut vaste et vide. Mais aussi rempli. Un garçon que je croisais tous les jours a décidé de faire des efforts. Il m'a demandé pardon...en se justifiant. Mais cela n'a pas suffit. Je suis alors venue le trouver dans sa "demeure" pour lui expliquer que, s'il voulait que la situation change, il faudrait agir autrement, franchement, mais que je lui pardonnerai volontiers dans ce cas-là. Mais ce n'étais pas le bon jour et il ne m'écoutait pas. Et ceci des millions de fois. Tout un an. Le reste du temps, on se lançait des regards noirs, désintéressés, supérieurs.

Pourtant, on a fini par s'entendre.

Un jour, je suis allée au château, en pleurs. Mon père avait eu un accident d'avion et il était alors à l'hôpital, dans le coma. En cours, je ne montrais pas mon inquiétude, ma tristesse. Mais le soir, je n'arrêtais pas de me demander ce que me dirait Maxence. Ce qu'il me conseillerait. Comment il réagirait alors. Donc, un soir, je n'en pouvais plus : ma mère en train de veiller mon père endormi, j'étais seule avec le devoir de travailler. Mais je n'y arrivais pas. J'avais une sérieuse baisse de mes notes. C'était une catastrophe. Alors, je suis partie au château. Cela faisait plus de trois mois que je ne lui parlais plus, que nous nous échangions des regards criminels, que je ne voulais même plus passer devant son château. Que je ne venais plus le rénover. Réparer ses bêtises. Plus d'une fois, j'avais voulu tout raconter. A tout le monde. A ma mère. A mon père. A ses amis. A ses ennemis. A ceux qui ne le connaissaient pas comme quelqu'un de vivant. A tout le monde. Bref! J'y arrivais donc vers 22 heures. Je suis rentrée. Je suis montée, ne le trouvant pas au rez de chaussée. Je suis arrivée à l'étage des chambres de la famille royale. Je me suis dirigée vers la chambre du prince. J'ai ouvert la porte. Tout était noir. Je suis entrée et j'ai allumé ma lampe de poche à la plus faible puissance. Gémissement. Je me suis tournée vers le lit. Allongé, le prince dormais, paisible dans ses draps rouges. Je mis la puissance de ma lampe plus forte. Il plissa les yeux, se redressa. Se tourna. Me regarda.

-Lyra? Mais que fais-tu ici à cette heure?

-Fais pas semblent! Tu n'as même pas regardé ta montre!

-N’empêche, il fait nuit. Donc, il est tard.

-Pff...On es en novembre!

-Bon, tu fais quoi ici, maintenant?

-Je viens te parler.

-Nooonnn...Sans blague! Je croyais que tu venais juste pour me tenir compagnie et pour dormir ici. Je t'assure!

Il était tout à fait redressé désormais. Il me regardait, curieux, impatient tout en s'efforçant de ne pas le montrer.

-Ça fait bientôt un an qu'on ne se parle plus "gentiment", que je ne viens plus t'aider à réparer tes bêtises, et pour finir, que j'ai découvert ton secret.

-Et quoi? Tu veux qu'on se réconcilie? Tu n'avais pas l'air très enthousiaste à cette idée!

-Non. Je ne veux pas forcément qu'on se réconcilie.

-Alors quoi? Tu veux que je te rende un service?

-Oui.

-Non mais quoi encore? En pénitence peut-être!

-Non. Je veux juste que tu m'écoutes.

-Et après?

-Et après rien. Je rentre chez moi. Pour pleurer toute seul dans mon lit ou dans mon salon. De toute manière, mes parents ne sont pas là.

-D'accord. Alors je t'écoute. Ça va t'éviter de pleurer?

-Non. Mais peut-être que je n'aurai plus besoin de rentrer chez moi et d'être toute seule.

Il me regarda, septique.

-Vas-y. Je t'écoute.

Et je lui déballais alors toute l'histoire. Mon père, ma mère en dépression, moi et mes notes, ma vie fichue en une année. En un an. Cet an de malheur qu'il était alors. A la fin de mon récit, j'étais assise sur une chaise, affaissée, en pleurs. Je regardais mes genoux. Le prince s'approcha. Il s'accroupit en face de moi. Il me sourit et me prit les mains. Il me prit le menton. Me força à le regarder.

-Lyra.Ton père va s'en sortir. Espère encore. Et ta mère aussi. Elle, s'est forcé. Tu es là et tu l'aidera. Regarde-moi. Seul, j'ai pourtant réussi à m'en sortir...alors que c'était de ma faute. Pourtant, je suis là aujourd'hui. Si cette situation te force à avoir besoin de moi, je saute sur l'occasion. On se réconcilie.

-...

-Je...

-Tu?

-Tu comptes beaucoup pour moi.

-C'est tout?

-Non.

-Ah.

-Je t'aime.

-Ah.

Et je fondai en pleurs dans son cou, contre ses épaules. Il me passa ses bras dans mon dos. Je n'eu même pas besoin de lui dire que je l'aimais aussi depuis toujours. Il le savait déjà. Il se contenta de m'embrasser quand je relevai enfin la tête, le visage trempé.

Hier, mon père s'est réveillé. Il va mieux. Il est sauvé. Avant-hier, c'était ce qui m'a fait écrire une dernière fois dans ce carnet, sur tes pages maintenant gribouillées d'encres, vues par mon petit ami.

FIN
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