Wiki Nos imaginations

Cette histoire a été écrite par Serow Awen

Chapitre 1

Le ciel était bleu azur, le soleil resplendissant. Une douce brise balayait l’horizon. Un petit village se profilait entre les montagnes, une route le coupant en deux. Petit chemin de terre, il serpentait entre les maisons de pierre. La guerre qui faisait rage là-bas ne semblait pas avoir touché ce paradis terrestre. Pourtant, chaque geste, chaque sourire, chaque larme des villageois semblait porter le poids du monde, de cette guerre lointaine. Chacun avait son fils, son mari, son père, son oncle... parti à la guerre. Les nouvelles du front étaient plutôt bonnes, certains osaient même espérer une fin à cet enfer. Et ces nouvelles redonnaient une force de vivre, une énergie perdue au début des combats. Les jeunes gens que les états n'avaient pas encore réquisitionnés et les vieilles personnes toujours dans la force de l'âge s'étaient donc réunis devant la mairie délaissée. Le bâtiment avait été entretenu par les voisins mais la charpente, difficile d'accès, tombait en lambeaux. Le charpentier avait été malencontreusement réquisitionné et malheureusement mort sur le champ de bataille. Son frère, une dizaine d'années plus vieux que lui, avait pris sa place et menait d'une main de maître les travaux.

- Allez, du nerf, criait-il. Tiens ta scie à deux mains, Franck ! Arrête donc tes mimiques, Johnny !

Chacun s’exécuta de bonne grâce. Le visage ruisselant de sueur, Stephan redoubla ses efforts. Ses phalanges étaient blanchies à force de serrer la scie, ses muscles endoloris et pourtant, ses gestes décuplaient de force, d'assurance.

- C'est bon, hurla le maitre charpentier improvisé. Fini, merci à tous et à demain !

S'essuyant le front d'un revers de main, Stephan lança un sourire au vieux directeur des travaux. Il prit d'un pas lent le chemin de chez lui, dans les hauteurs. Au fur et à mesure de son ascension, la douce brise se transforma en un vent froid qui défait la grandeur du monde. Ne s'en formalisant pas, Stephan régla sa respiration encore saccadée sur cet hymne de liberté. Ce vent semblait porter les remords de la guerre, si lointaine, et pourtant si proche. Un poids écrasant, que tous portaient d'une façon ou d'une autre. Certains en s’abrutissant d’alcool, d'autres en dépassant leurs heures de travail, et de beaucoup, ou encore en ne parlant plus. Les fils voulaient faire honneur à leur père mort sur le champ de bataille, les épouses priaient pour leurs maris dont elles n'avaient aucune nouvelle.

À mi-altitude, le sentier qu'empruntait Stephan cessa peu à peu de monter ; bientôt, il s'arrêta. Bifurquant, Stephan s'enfonça dans les bois.